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Vacataire en colère- Le blog de Carmen

27 Février 2014 , Rédigé par collectif FLE sud est Publié dans #TEMOIGNAGES

 

Le Blog de Carmen, Vacataire en colère n'existe plus, nous avions heureusement sauvé un de ses articles que nous reproduisons ici... Le collectif FLE

 

 

Son objectif ?

Contribuer à faire connaître la situation des enseignants vacataires et en particulier des professeurs de langues étrangères

Devenir (en toute modestie) la porte-parole d'un groupe dont les revendications sont légitimes

 

Alors imaginez : Vous avez fait des études de langue, puis vous avez séjourné à l'étranger, vous avez une formation pédagogique. Non je me trompe, vous êtes madrilène, vous avez fait des études de français et d'espagnol, vous avez choisi de vivre à Brest, parce que pour vous, c'est la plus belle ville du monde. Vous aurez certainement envie d'enseigner l'espagnol, votre langue maternelle. Vu le nombre d'écoles supérieures, vous vous dites que cela ne doit pas être si difficile, si on a les diplômes requis.

Vous allez appliquer bien sûr les techniques de recherche d'emploi classiques. D'abord, vous allez être surpris, car il n'y a aucune offre de ce genre à l'ANPE, ni dans les journaux. Mais justement, par chance, vous connaissez quelqu'un qui connaît quelqu'un qui s'entend bien avec un responsable dans une école et ils ont besoin de quelqu'un en espagnol. La première question que l'on vous posera lors de l'entretien vous étonnera sans doute : "Vous avez un employeur principal. Vous ne pouvez pas travailler chez nous sans employeur principal." Un employeur principal ? Je vous explique : la présence d'un employeur principal garantit que vous n'allez pas, après quelques années, réclamer indûment un poste. De plus dans certains cas, si vous avez un poste à temps plein, votre nouvel employeur n'aura pas à payer la totalité des charges. Dans ce secteur d'activité, on donnera donc de préférence du travail aux personnes qui n'en ont pas besoin. Cela ne vous arrange guère, évidemment. Mais on trouvera une solution. Peut-être, le portage salarial. Pas très répandu évidemment, car c'est un service payant. On suggèrera aussi que vous deveniez votre propre employeur en créant votre petite entreprise. Vous deviendrez donc prestataire de service du service public. Vous trouvez que c'est bizarre. Votre prestation, l'enseignement, relève du service public, surtout dans une école publique. Les mauvaises langues vous diront bien sûr que c'est un cas de salariat déguisé, qu'il y a un lien de subordination. Ne les écoutez pas, vous voulez travaillez, non? Certaines écoles, heureusement, n'ont pas cette exigence. Bon, pour vous tout s'arrange, vous avez des heures. Bienvenue au vivier ! Sachez quand même que le nombre d'heures que vous pourrez faire dans une école est plafonné. Toujours pour éviter toute velléité de titularisation. Si vous avez de la chance, vous aurez assez de travail en partageant votre temps entre 2 ou 3 écoles. Ecolo ou pas, tant pis, vous consommerez pas mal de carburant. J'oubliais de vous dire que vous serez payé pour les heures de cours réellement donnée. Donc pas de grippe cet hiver et évitez le ski, trop dangereux. D'ailleurs les vacances, comme vous ne serez pas payé, évitez les grosses dépenses. Et puis question sécurité de l'emploi, ce n'est pas idéal. C'est ce que répondra le banquier quand vous lui demanderez un prêt (pour acheter une voiture moins polluante). Mais quand on a du travail aujourd'hui... A bientôt.

Votre nom, c'est Carmen ?

Elle a apporté cette semaine sa modeste, mais méritoire, contribution à la formation intellectuelle de l’élite de la nation : 5 heures d’espagnol à l’ENTA. Elle était toute fière, toute contente, comme un gamin qui aurait décroché … Mais la rencontre avec les autres vacataires a mis un sacré bémol à son enthousiasme juvénile. Oui, elle a rencontré les professeurs d’allemand, anglais, arabe, chinois, espagnol, français, japonais, portugais, russe (voyez, pour ne blesser aucune susceptibilité, je respecte l’ordre alphabétique), qui travaillent à l’école. Des femmes majoritairement. Et, comme on dit poliment, d’un certain âge. « Moi, ça ne m’arrivera jamais, a pensé Carmen, à cet âge-là, moi, j’aurai un emploi stable. » Le pire, c’est que, comme elle est nouvelle, à la pause autour d’un café imbuvable servi dans un gobelet en plastique, les collègues ont voulu lui faire entendre le « blues du vacataire». Ce n’est pas un chant révolutionnaire qui vous mène au combat, c’est une chanson clandestine qu’on chante entre soi sans surtout élever la voix. Vous avez de la chance, j’ai noté le texte.

« Après les angoisses du début d’année

T’as travaillé trois mois, toujours pas payée

Et les heures supprimées, pas rémunérées

T’auras pas de contrat, c’est l’Etat

N’attends pas le syndicat, il est pas là

Gare à toi, sois toujours sympa

C’est le règne de l’arbitraire, du pouvoir discrétionnaire

Si ça te plaît pas, tu peux rentrer chez ta mère

Tu comprends pas, ouvre le dictionnaire, t’es vacataire » ;

 

Refrain : Tu ne peux rien changer

Si tu protestes, tu te fais virer

Des bottes, tu devras lécher

Surtout, ne te fais pas détester

 

Quand Carmen a voulu introduire une note plus positive, on lui a répondu avec toujours les variations du même thème : ‘T’as aucun droit, ici c’est chacun pour soi’.

Le blues, elle est en train d’en faire un rap.

 

La riposte syndicale :

Profession sinistrée, droits des salariés bafoués, patrons désabusés, flexibilité désordonnée... La dureté des injustices au travail un : un vrai terrain de combat pour défendre ses droits.

Dans le blues pessimiste de Carmen, il manque l’aspect positif de l’espérance, le désir de reconnaissance politique et sociale revendiqué, l’interaction entre les contraires qui s’affrontent sainement.

Partout, les formateurs de langues s'organisent et défendent leurs emplois.

Il faut y croire !

 

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